Ange @ le Trianon, Paris - 31 janvier 2020


Il y a un demi-siècle jour pour jour, Ange donnait son premier concert, dans une configuration bien différente de celle du groupe qui tourne aujourd'hui. L’occasion pour son meneur historique Christian Décamps d’organiser un beau raout entre les murs tremblants du splendide Trianon, vénérable théâtre de Pigalle plein comme une oeuf de poule dentée.

John Lennon, qui en plus d’écrire de sacrément bonnes chansons avait le sens de la formule, avait bien résumé les choses en disant que le rock français, c’était un peu comme le vin anglais : une aberration. Un jugement auquel je souscris en partie, avec toutefois quelques réserves. Et puis, Ange est-il vraiment rock ? Et Ange est-il vraiment français ?

Eh bien, oui, quand même. Et pire encore : c’est du rock progressif théâtral français à tendance médiévale... Autant dire qu’il vaut mieux ne pas être réfractaire à une certaine dose de grandiloquence. Ce qui sauve le tout du ridicule ? Des morceaux sacrément bien troussés, comme des traités de pataphysique mis en musique par un Genesis provincial. Et aussi un sens de l’humour poétique, surréaliste, lunaire.

La soirée commence par quelques morceaux joués en solo par Tristan Décamps, fils du leader, qui remplaça dans le groupe son oncle Francis aux claviers il y a vingt-cinq ans. Puis, à dix-neuf heures quarante-cinq précises, le groupe entre en scène. S’ensuivent plus de deux heures de spectacle, drôle et émouvant.

Compte rond oblige, le concert voit le retour, l’espace d’un ou plusieurs morceaux, de musiciens ayant marqué l’histoire angélique sur disque comme sur scène, à commencer par Francis Décamps. Mais aussi Daniel Haas, Fabrice Bony, Caroline Crozat, Serge Cuénot, Hervé Rouyer, Laurent Sigrist...

Heureusement, cet aspect convivial n’empiète pas sur l’essentiel : le répertoire. Car c’est bien cela que le public est venu célébrer ce soir, et Christian Décamps l’a bien compris, déroulant les morceaux de manière chronologique. Pari risqué que de jouer les "classiques" en premier, mais pari réussi : en effet, les chansons tirées de Le Bois Travaille Même Le Dimanche ont eu droit au même accueil que celles extraites de Caricatures. Mais il est vrai que ce soir, Ange joue en terrain conquis : les mille deux cents personnes du Trianon sont majoritairement des fans acharnés.

Aussi sympathiques que furent les interventions des membres historiques, c’est la formation actuelle qui se taille la part du lion. Tristan Décamps, derrière ses claviers, fait office de directeur musical et s’autorise quelques incursions sur le devant de la scène, mettant à profit sa voix agile.

Hassan Hajdi, guitariste du groupe depuis un quart de siècle, est tout aussi impressionnant. Technique et fluide, tour à tour funky et heavy mais toujours bon enfant, son style s’avère aussi pertinent sur les morceaux récents qu’il a contribué à créer que sur les anciens.

Fil rouge de la soirée comme de la carrière du groupe, véritable Monsieur Loyal, Christian Décamps endosse successivement les rôles des personnages qu’il chante : capitaine de bateau ivre, mendiant ingrat, Père Noël dément, clochard céleste, poète oublié, rock star... Qu’importe si sa voix lui fait défaut ici ou là.

La soirée se termine avec tout le monde sur scène pour chanter Hymne À La Vie, tiré de leur album Par Les Fils De Mandrin.

Demain, Ange sera de nouveau au Trianon pour présenter un tour de chant sans doute identique à celui-ci. Puis ils iront jouer partout en province, comme ils le font depuis cinquante ans. Car s’il est important de s’arrêter et de regarder en arrière avec fierté, il est aussi crucial de continuer à avancer.

Joyeux anniversaire.


 

   


   

  



  


 

  

  

 

  




  

 

 

 


 

  

 


 


 

 

 


 

  


  

 

 


 

  


 

 


  




 


 


 

  

 

  

 

  

 

  



 

 

  

 

 


   

  

 


 


  

 

 

 

 

 


  




 

 

 

 

  




 



  


 


  



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